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Nadi Shodhana est un pranayama que l’on appelle en français “la respiration alternée”. Je te propose un tour d’horizon sur cette pratique : comment la réaliser, ses bienfaits et contre-indications. J’ai souhaité également évoquer en introduction des concepts clefs qui lui sont liés pour donner une vision plus complète du cadre dans lequel s’inscrit cette pratique.
Contexte et concepts clefs
Avant de rentrer dans le vif du sujet concernant Nadi Shodhana, il est important je pense de faire un point sur son contexte. Voyons ensemble rapidement les mots et concepts qui entourent cette pratique pour en avoir une compréhension globale et pas seulement mécanique.
Pranayama
Il existe de nombreux livres uniquement consacrés aux pranayamas et surtout de nombreuses définitions selon les écoles, comme le souligne à juste titre Mark Stephens dans son ouvrage L’enseignement du Yoga (tome 1)
Le pranayama renvoie aux facettes les plus confuses du yoga. Plusieurs écoles de yoga décrivent même sa forme la plus basique, ujjayi, à travers des cheminements différents et contradictoires. S’agit-il du « prana-yama », que l’on s’accorde à traduire plus habituellement par « contrôle de la respiration » ou « contrôle de la force de vie » ? S’agit-il du « pran-ayama » qui évoque pratiquement l’inverse : la « libération de la respiration » ou « l’expansion de la forme de vie » ? Les définitions divergentes apparaissent dans les Védas, les Upanishads, les Yoga Sutras de Patanjali, la littérature tantrique et les écrits classiques de l’hatha yoga, entre les XIVe et XVIIe siècles.
L’enseignement du Yoga (tome 1), Mark Stephens
Pour faire simple, Pranayama est une pratique respiratoire. On vient contrôler son souffle pour libérer notre énergie, notre prana. Il y a plusieurs phases possibles dans un pranayama : inspiration, expiration, rétention de l’air poumons pleins et rétention de l’air poumons vides. Chaque exercice combine ces phases avec pour buts premiers d’accroître la capacité respiratoire, calmer l’esprit et faire circuler l’énergie dans nos corps.
Pranayama est également une des huits branches du Yoga tel que décrit par Patanjali dans les Yoga Sutras (2.49 à 2.53). Mes explications ici sont volontairement courtes car je prendrai le temps de développer Pranayama dans un article dédié.
Nadi, Sushumna, Ida et Pingala
Nadi signifie en sanskrit “l’eau qui court”. Un nadi est un canal d’énergie et selon les anciens textes yoguiques (plus précisément les Brihadaranyaka Upanishad, 700 ans avant JC), il est dit qu’environ 72 000 de ces canaux nous parcourent. On peut les comparer aux méridiens de la Médecine Traditionnelle Chinoise.
Pour aujourd’hui, mettons simplement en lumière les trois nadis principaux : sushumna, ida et pingala.
Sushumna nadi peut être vu comme le canal central le long de notre colonne vertébrale. On utilise souvent l’image d’une “autoroute”, route principale dans laquelle circule les énergies, du plancher pelvien jusqu’au sommet du crâne (courant de libération – transcendance) et à l’inverse du sommet du crâne vers le plancher pelvien (courant de manifestation – incarnation). On peut le faire correspondre physiquement avec le système nerveux central ou à l’association du cerveau / moelle épinière (voir schéma sur l’organisation du système nerveux plus bas).
Le long de ce canal central se croisent deux canaux “secondaires” : Ida et Pingala.
🌙 Ida nadi est le canal de gauche. Il est associé au système nerveux parasympathique dans le système nerveux autonome et à l’hémisphère droit du cerveau. Ida nadi est symboliquement associé à la douceur, au principe Yin, féminin, lunaire. On le relie à l’intuition, l’esprit, à la passivité et à ce que l’on internalise. C’est l’aspect du Guna Tamas qui prédomine ici – du relâchement à l’inertie.
☀️ Pingala nadi est le canal de droite. Il est associé au système nerveux sympathique dans le système nerveux autonome et à l’hémisphère gauche du cerveau. Pingala nadi est symboliquement associé au masculin, à la dureté, au principe Yang, solaire. On le relie à la logique, à l’externalisation et à l’activité. C’est l’aspect du Guna Rajas qui prédomine ici – de l’action à à l’hyperactivité.
Ida et Pingala représentent donc deux polarités opposées. A travers le Yoga entre autres, nous cherchons à trouver un équilibre harmonieux entre ces deux pôles, à leur laisser une place équivalente. Ce point d’équilibre n’est pas que énergétique ou symbolique, il est aussi physique à travers la pratique des asanas. Ce principe d’équilibre n’est pas unique au yoga puisqu’on peut le retrouver par exemple en Chine avec le Tao (Dao) ou encore en Egypte avec la Maât.
Voilà autant de sujets passionnants qui remplissent bien des livres, mais revenons à notre sujet de départ : la pratique de Nadi Shodhana.
Nadi Shodhana en pratique
Après ces tours et détours à travers le souffle, le système nerveux, les canaux d’énergie de notre corps, penchons nous sur ce qu’est Nadi Shodhana.
“Nadi shodhana” signifie la purification des nadis, autrement dit des canaux d’énergie. La respiration alternée entre la droite et la gauche permet de revenir à un équilibre entre les deux polarités Ida et Pingala que nous venons de voir.
Comment ça se pratique ?
Mise en place
Posture
On cherche une assise confortable, que l’on soit en padmasana (posture du lotus) ou en sukhasana (assise confortable). On peut se placer sur un coussin ou tout autre accessoire (brique, zafu, etc…) comme lors d’une méditation, pour surélever les hanches par rapport aux genoux. On garde le dos droit – ni avachi, ni crispé – et notre regard fixe un point en face de nous.
Mudra
Nadi Shodhana se pratique traditionnellement avec la main droite en Vishnu mudra – index et majeur repliés vers l’intérieur de la paume, annulaire et auriculaire tendus ensemble.
Si ce mudra est physiquement dur à tenir, on replie également l’annulaire.
A noter également, si maintenir le bras droit actif devient source de tension, on viendra mettre la main gauche en coupe sous le coude droit pour le soutenir. On cherche comme toujours à pratiquer dans la douceur, avec facilité.
Alternance du souffle
On vient boucher alternativement la narine droite avec le pouce et la gauche avec l’annulaire (ou l’auriculaire en version modifiée).
Pour fermer une narine, on fait attention à ne pas appuyer trop fort. On viendra placer la pulpe du doigt sous l’os du cartilage du nez.
On cherche également à avoir les mêmes longueurs de souffle entre inspire et expire. Il peut être utile de les compter si l’on souhaite.
Cycle de Nadi Shodhana en pratique
Voyons maintenant un cycle de Nadi Shodhana ensemble !
Depuis notre posture assise, on commence par prendre quelques inspirations et expirations libres pour s’ancrer sur la pratique que l’on va effectuer.
Cycle en version détaillée
🤙 | On effectue Vishnu Mudra avec la main droite. |
☀️ | A la fin de la prochaine expiration libre, on vient bloquer la narine gauche avec l’annulaire et inspirer lentement par la narine droite (compter 3 temps par exemple). |
🤙 | A la fin de l’inspiration, on bloque les deux narines avec le pouce sur la narine droite. |
✨ | On retient la respiration sur un temps, pour une petite rétention du souffle poumons pleins. Cette rétention se nomme Antar Kumbhaka. |
🌙 | Expiration par la narine gauche sur 3 temps (ou plus selon notre temps d’inspiration). |
✨ | On retient la respiration sur un temps, pour une petite rétention du souffle poumons vides. Cette rétention se nomme Bahir Kumbhaka. |
🌙 | Inspiration par la narine gauche sur 3 temps. |
🤙 | A la fin de l’inspiration, on bloque les deux narines avec l’annulaire sur la narine gauche. |
✨ | On retient la respiration sur un temps, pour une petite rétention du souffle poumons pleins (Antar Kumbhaka). |
☀️ | Expiration par la narine droite sur 3 temps (ou plus selon notre temps d’inspiration). |
✨ | On retient la respiration sur un temps, pour une petite rétention du souffle poumons vides (Bahir Kumbhaka). |
☀️ | Inspiration par la narine droite sur 3 temps. |
Cycle en version abrégée
🤙 | Vishnu Mudra avec la main droite. |
☀️ | A la fin de la prochaine expiration libre, bloquer la narine gauche avec l’annulaire et inspiration par la narine droite |
🤙 | Bloque les deux narines |
✨ | Antar Kumbhaka |
🌙 | Expiration par la narine gauche |
✨ | Bahir kumbhaka |
🌙 | Inspiration par la narine gauche |
🤙 | Bloque les deux narines |
✨ | Antar Kumbhaka |
☀️ | Expiration par la narine droite |
✨ | Bahir kumbhaka |
☀️ | Inspiration par la narine droite |
On répète ce cycle en boucle sur le temps que l’on désire pratiquer – idéalement sur cinq minutes quand on veut faire une pause dans sa journée ou en début de pratique yoguique (avant la méditation ou des asanas).
Bienfaits
Nadi Shodhana vient nettoyer les nadis en apportant l’équilibre en Ida et Pingala. Cet équilibre est régulièrement perdu car nous avons toujours une narine dominante, dominante qui change au cours d’une même journée. Nadi Shodhana permet de lisser ce cycle naturel des narines dominantes, entre Ida et Pingala, pour ramener le souffle et l’énergie au centre.
Revenir à l’équilibre permet de calmer le mental mais contre les effets des narines / canaux dominants :
- Ida (gauche) trop dominant pousse vers l’indolence, la dépression ou une trop grande passivité
- Pingala (droit) trop dominant provoque nervosité, agitation mentale ou une confiance en soi un peu trop débordante pour son environnement
Contre-indication
On évite les rétentions du souffle si on a des problèmes cardiaques, de gestion de la température corporelle ou si on est enceinte. L’alternance des narines n’a quant à elle pas de contre-indication, on peut la pratiquer en toute sécurité.
J’espère que cet article te donnera envie de pratiquer Nadi Shodhana et d’intégrer des pranayamas plus souvent dans tes journées.
3 Responses
[…] la gestion de l’énergie vitale à travers des exercices respiratoires. J’ai déjà évoqué la pratique de Nadi Shodhana dans un article précédent – mais il existe énormément de techniques […]
[…] exercices respiratoires (comme celui de Nadi Shodhana) […]
[…] travaille généralement l’observation des vayus en nous à travers des pranayamas – comme Nadi Shodhana – et différentes techniques de […]